Gravité à la manque - George Alec Effinger

Thom · February 8, 2015

FolioSF

When you’re lost in the rain in Juarez and it’s Easter time too When your gravity fails you and negativity don’t pull you through Don’t you put on any airs when you’re lost on Rue Morgue Avenue They got some hungry creatures there, they’ll surely make a mess out of you

Bob DYLAN - Just Like Tom Thumb’s Blues

Dès sa naissance Marîd Audran a été contradiction pure et dure. Issue d’une mère Fellahin et d’un père français, il cultive les différences en n’étant ni Musulman, ni câblé. Marîd aime bien se servir de son cerveau tel qu’il est, surtout quand il s’agit de répondre des bonnes us et coutumes qui règnent dans Boudayin pour enquêter comme détective privé. Sa semaine commence d’ailleurs admirablement. Son client, un richissime homme d’affaire russe vient juste de se faire descendre par un timbré qui utilise un mamie de James Bond juste après lui avoir donné un beau paquet de kif avec la mission de retrouver sa fille. Ces modules mimétiques, une fois enfichés dans un cerveau câblé permettent de s’identifier corps et âme au personnage imaginaire ou fictif souhaité. Ils sont souvent agrémentés de papie, des périphériques d’apprentissage électronique qui permette à la personne d’avoir un flot de connaissance immédiat. Après avoir été questionné par le lieutenant Okking, la période de tranquillité auprès de sa copine Yasmin ne sera finalement que de courte durée. Nikki, une prostituée sexchangiste avec qui il entretient des relations amicales, souhaite se défaire de son mac pour de bon. Les morts étranges vont alors commencer à pointer le bout de leur nez dans le quartier ainsi que les embrouilles que ce soit avec les Veuves Noires, Abdoulaye et même Friedlandeur Bay le teneur de ces lieux qui a la Baraka. On va suivre cette enquête policière à la fois menée et subie par Marîd…

La boite de Chiriga était situé en plein centre du Boudayin à huit pâté de maison de la porte orientale et à huit pâté de maison du cimetière. Pratique de l’avoir si prêt.

Gravité à la manque est un polar cyberpunk. On ne parle peut-être pas d’ordinateur mais quoi de plus logique dans les villes malfamées et quasi désertique de Boudayin. On retrouvera fort heureusement les petits délices de la bonne grosse dose de drogues, cerveaux amplifiés et même de modification médicale permettant au personne de changer de sexe. Dans ce monde Musulman, on s’attache très rapidement à Marîd Audran qui se situe à mi-chemin entre le paumé un peu looseur qui se drogue à s’en faire péter les circuits et le détective indépendant un peu plus intelligent que tout le monde et au courant de tout ce qui l’entoure. Autour de lui, gravite bon nombre d’énergumènes tous plus louches les uns que les autres. Que ce soit ces amis comme le demi-Hadj où certaine des connaissances comme les sœurs Veuves Noires. L’un de mes préférés restant Bill le conducteur de taxi qui s’est fait juste implanté un distributeur de drogues continu pour être constamment en hallucination. Les lieux sont également bien représentatifs du monde Arabe avec les portes qui ouvrent les villes, les casbahs qui cachent leurs richesses derrière leurs murs, les rads miteux où les touristes se font harponner par les strip-teaseuses. Le patchwork que composent ses personnages dans cet univers nous charme énormément en nous présentant les rituels de bonne conduite musulmane donnant à ce livre une dimension, une ambiance et un cachet particulier. On suit l’enquête avec enthousiasme toujours avec le sourire face aux remarques sarcastiques de Marîd qui se plaît à passer pour un con pour éviter d’avoir à rendre des comptes.

US

À défaut de gravité, c’est bien ce bouquin qui m’est tombé dessus au meilleur des moments. Après quelques lectures difficiles comme l’Empereur Dieu de Dune, j’avais besoin d’un livre court, prenant et furieusement cyberpunk. De plus, je partais pour le Maroc et plein de petits détails m’ont été utiles comme le fait de ne pas refuser du thé quand celui-ci vous est proposé et plein de détails que j’ai vu m’ont aidée à comprendre cet univers avec notamment les portes du désert et le fait de cacher sa richesse aux yeux des autres. De même, le symbole de Lune d’Encre en forme de croissant de lune renversé n’est rien d’autre que ce qu’on voit la nuit quand on lève les yeux dans un pays du Maghreb. Un très bon livre qui mélange le polar et le cyberpunk dans un tajine explosive pleine d’humour.